– Épigrammes –
J’ai pu trouver en italien quelques textes de Sinan Gudzevic, poète serbe et talentueux traducteur. Pour lui les langues sont sœurs et amies, que ce soit l’allemand, l’italien, le portugais (Pessoa bien sûr), le latin et le grec antiques. Voyageur impénitent et ubiquiste, on le retrouve au Brésil enseignant le russe. Il suffit donc d’écrire pour que la vie devienne roman, page ouverte sur le monde.
Horaire d’un voyage
Une petite demi-heure avant Pisino
La femme sur le siège d’ à côté me demande
Et vous continuez jusqu’où
Fiume
J’écris de l’index sur la vitre
Moi aussi jusqu’à Fiume dit-elle
Bien que je ne lui ai rien demandé
Le sang limpide
Ma sœur Sadika
a été kidnappée alors qu’elle était dans ses couches
Depuis,
la mère n’accouchait que d’enfants mâles
Nous, les quatre frères
nous nous réunissons pendant l’été et nous discutons
sur l’endroit où l’on pourrait retrouver notre sœur
Et il ne nous est rien donné d’apprendre
Les années passent
et le sang devient toujours plus de l’eau
22.VIII.1976
Nous suivons la partie retransmise
Borac-Partizan
Borac mène un à zéro
le Partizan est deux fois meilleur
et ne fait qu’attaquer
En ce jour de l’année soixante et onze
jouèrent à Belgrade
Partizan et Borac
Ce même soir
meurt du cancer mon beau-père
Iljaz Kalčinić
Son fils et moi
Nous passons la nuit en prison
En fêtant le Partizan
Victorieux par deux à un
Nous provoquons une rixe dans la rue
J’ai l’impression de lire des nouvelles d’un ami, et je pense revenir vers Sinan, ne serait-ce que pour rendre compte de ses épigrammes à la mode latine. Quand je serai plus courageux.
Okuba